Novembre 2016

Cahier SIPR n° 3

 

Bergson couv web

 

Philosophe au seuil d’une conversion :
BERGSON


     Nul n’aura sans doute plus que Bergson contribué, dans un contexte universitaire et culturel dominé par le scientisme positiviste et matérialiste, à réhabiliter et à pratiquer à nouveaux frais la métaphysique, moyennant un usage de l’intelligence qui redécouvre sa capacité propre d’intuition. Rien d’étonnant à ce que Bergson, vu cette orientation fondamentale de sa pensée, ait donné plus d’un signe de son approche d’une conversion au catholicisme, que sans doute seule sa volonté de rester solidaire du peuple juif, au moment de la plus grande menace, l’a retenu d’officialiser. Trois lettres inédites du Père Sertillanges apportent un témoignage des plus éclairants sur l’état d’esprit du tout dernier Bergson.


Un ouvrage de la Société Internationale de Philosophe Réaliste avec les contributions de :
Pierre MAGNARD : La chaîne d’or
Jean-Baptiste ÉCHIVARD : Du nouveau sur la « conversion » de Bergson ?
Henri HUDE : Religion, sainteté, mystique


Collection « Dialogues »
Format 15,20 x 23,50 – 110 pages – 12 €
ISBN 979-10-93043-18-0 – ISSN 2418-2761
Sortie le 25 octobre 2016 – Diffusion Vrin
Disponible en service de presse sur demande à contact@ipc-paris.fr

 

 

Colloque international sur le réalisme (Paris, 16-19 novembre 2017)

 

https://www.youtube.com/watch?v=YCKI9so3yWc&list=PLOMyVuRpZKx0UZgXfzkG8ppTTEiN7yQp2

 

« Réalisme direct » ou « perceptuel », « matérialisme spéculatif », « ontologie orientée objet ». La philosophie contemporaine connaîtrait-elle son moment réaliste ? Derrière les positions fort hétérogènes que recouvrent ces désignations, on trouve le refus commun de certains thèmes d’époque : l’interprétationnisme d’abord, qui veut qu’une chose ne soit pas séparable de sa représentation, et donc du contexte épistémique ou de la perspective dans lesquels elle est appréhendée et pensée ; le relativisme ensuite, qui finit par ne plus tenir pour réelles que les perspectives elles-mêmes, au risque de faire le lit du fidéisme. Pour nous réveiller de cette forme insidieuse de « sommeil dogmatique », le réalisme revendique d’une manière ou d’une autre la possibilité de parler du réel indépendamment de ce qui conditionne notre accès à lui: structures intentionnelles de la conscience, schèmes conceptuels, formes symboliques, institutions et constructions sociales, etc.

Kant mettait en garde contre les risques encourus par toute pensée qui prétendrait aborder les rivages de l’inconnaissable «chose en soi». Nietzsche et ses héritiers postmodernes, convaincus qu’il n’y a pas de « hors texte », avaient accusé le trait en poussant l’interprétationnisme jusqu’à ses conséquences les plus paradoxales. Les « nouveaux réalistes » prennent le taureau par les cornes : non seulement ils affirment que le réel n’est pas forclos, que nous l’atteignons bien d’une certaine façon lui-même, mais ils entendent parler des choses en soi, dans leur diversité innombrable. Considérer les choses à l’état sauvage, en deçà des modes par lesquels des sujets humains pourraient s’y rapporter comme à des objets, en deçà des partages hiérarchiques qui les ordonnent à notre monde, c’est aussi une manière de dépasser l’anthropocentrisme qui grève toute pensée qui n’aurait pas su tirer les leçons du thème galiléen de l’« indifférente nature ». La pensée se confronte ainsi avec un champ pré-phénoménal, aux confins ou au-delà de l’expérience : un univers d’avant ou d’après l’homme, la conscience, le sujet transcendantal. Y a-t-il là davantage qu’un nouveau point focal pour l’imagination métaphysique? À quelles opérations sommes-nous engagés si l’« intuition intellectuelle » fait défaut ?

Le revirement réaliste a en tout cas pour vertu de faire converger des traditions philosophiques qui n’ont pas toujours volontiers dialogué entre elles. Il permet de mettre en évidence des airs de famille parfois insoupçonnés. Ainsi, la réaffirmation d’une position fortement réaliste peut apparaître comme une nouveauté au regard d’un héritage idéaliste qui court jusqu’à Husserl, d’un empirisme redéfini à l’aune des formes logiques du discours, ou encore d’une interprétation dominante de la pragmatique des « jeux de langage ». Mais

l’injonction réaliste, la revendication des choses en soi, est déjà beaucoup moins originale dans le cadre d’une philosophie analytique qui, depuis Frege, Russell ou Moore, s’est généralement réclamée – en l’étayant sur la présomption référentielle des énoncés vrais du discours –d’un robuste réalisme, et nullement d’un quelconque idéalisme logique. Ce réalisme avait d’ailleurs bien été perçu, à l’époque, comme quelque chose de libérateur.

La nouveauté, s’il en est une, tient sans doute davantage à la tonalité ouvertement métaphysique de ce retour du réalisme philosophique, en rupture avec une certaine orientation épistémologique commune aux productions analytique, continentale et française. Il s’agit de mettre en cause la subordination du mode d’être des choses à la possibilité de leur connaissance, autrement dit de refuser de lier d’emblée la question de l’être à celle de son sens. Là encore, cette tentative recoupe au moins en partie certains enjeux du tournant ontologique amorcé depuis quelque temps par la philosophie analytique. Celle-ci n’a en effet cessé, dans sa période post-quinienne, de contourner les prescriptions anti-métaphysiques du positivisme logique en refusant d’assimiler la théorie de la vérité aux différentes variantes du vérificationnisme, ou de réduire l’enquête ontologique à une affaire de cadres linguistiques ou de schèmes conceptuels. Sur le versant continental ou français, la revendication du réalisme témoigne de la continuité d’une tradition métaphysique originale qui dément les clichés usés du « postmodernisme » et d’une French Thought vouée à un travail de déconstruction sans fin. Cette tradition métaphysique s’est d’ailleurs développée aussi en sourdine au sein de la phénoménologie elle-même, en la contaminant parfois de l’intérieur.

Une dernière caractéristique vaut d’être soulignée. Face aux différentes variétés du réductionnisme, les approches réalistes contemporaines sont volontiers pluralistes. On touche ici au noyau dialectique du réalisme des choses en soi, et peut-être à l’une de ses principales apories. Tout se passe en effet comme si le fait que la réalité des choses ne se résume pas à leur mode d’appréhension autorisait justement une démultiplication indéfinie de ces modes, bien au-delà du contexte de l’activité humaine ou même animale. Tandis que certains s’efforcent de théoriser l’« inter-objectivité » des choses ou de frayer la voie d’une nouvelle cosmologie, d’autres vont puiser des ressources dans l’éthologie ou l’anthropologie, du côté du perspectivisme « multinaturaliste » par exemple. Un réalisme conséquent, prévenu contre le réalisme « naïf », n’est donc pas condamné à s’inscrire dans la continuité du naturalisme scientifique, ni à adopter telle quelle son ontologie de base, s’il en existe une. Mais à invoquer ainsi le perspectivisme, le réalisme ne se rapproche-t-il pas à nouveau dangereusement de l’interprétationnisme dont il tentait précisément de se démarquer ? Comment ce pluralisme tendanciel se conjugue-t-il avec le monisme ou l’univocité de l’« en soi » ? De quoi peut-on s’autoriser lorsqu’on s’aventure au-delà de cette évidence obscure : « il y a » des choses ? Et comment éviter alors de retomber dans les ornières d’un réalisme « dogmatique » multipliant les constructions métaphysiques sans garde-fous ?

Ces questions conduisent à revisiter quelques lieux théoriques de la philosophie contemporaine. On se demandera par exemple quelles places occupent respectivement, dans la définition d’une stratégie réaliste, les motifs du donné et celui de l’accès au donné ; quelle part revient à ce qui, au sein de la donation, excède tout donné ; comment le réalisme métaphysique en vient à se brancher sur des théories de la référence directe ou du contenu non-conceptuel ; comment il accommode les questions normatives, le domaine des valeurs ; quel rôle y jouent les concepts d’objet et d’événement, de nécessité et de contingence, de monde et de nature, de Dieu et de totalité. De même, on s’interrogera sur la portée critique de la référence au transcendantal (dans ses versions pures comme naturalisées), ou du recours au vocable de la « chose en soi » et du « phénomène », chez ceux-là mêmes qui ambitionnent de penser à hauteur du « grand Dehors ». De manière générale, quels rapports l’approche spéculative du réel entretient-elle aux régimes ontologiques habituellement adoptés par le discours métaphysique, jusque dans ses variantes critique ou analytique : théorie de l’objet quelconque, doctrine des catégories, enquête sur les modes d’existence ? Enfin, si l’attitude réaliste elle-même témoigne d’une capacité anthropologique historiquement constituée, empiriquement avérée, à se rapporter à un « dehors » inhumain, il convient de réfléchir de façon plus précise à la manière dont le réalisme scientifique et les domaines d’objectivité naturalistes se trouvent mobilisés dans la discussion. Tels sont quelques-uns des problèmes qu’on tâchera d’examiner, en prêtant une attention particulière aux expériences, aux lieux et aux objets privilégiés qui motivent l’adoption, en philosophie, d’une position réaliste ; mais aussi aux raisons qui font que ce réalisme prend ou non, finalement, une forme métaphysique.

Emmanuel ALLOA et Élie DURING

Organisation

Emmanuel Alloa (University St. Gallen, School of Humanities and Social Sciences) Elie During (Université Paris Ouest Nanterre, IREPH)
Frédéric Worms (Ecole Normale Supérieure, CIEPFC)

Mercredi 16 novembre 2016

Lieu : Université Paris Ouest Nanterre

Amphithéâtre Max Weber, bâtiment W

14.00 Introduction

14.30-16.00 Table ronde 

Le moment réaliste : état des lieux

Modération : Emmanuel Alloa (Univ. Saint-Gall)

Isabelle Thomas-Fogiel (Univ. Ottawa) : « Le réalisme aujourd’hui : une “constellation conceptuelle” ? »

Tristan Garcia (Lyon III Jean Moulin) : « Réalisme épistémologique, libéralité ontologique »

16.00-16.15 Pause

16.15-17.45 Table ronde

Questions d’ontologie

Modération : Élie During (Paris Ouest Nanterre)

Jean-Michel Salanskis (Paris Ouest Nanterre) : « Les modalités : perspectives analytiques et françaises »

David Rabouin (CNRS - Paris Diderot) : « Ontologie(s) plate(s) : Spinoza redivivus ? »

17.45-18 Pause

18.00-19.00 Conférence : Eduardo VIVEIROS DE CASTRO (Museu Nacional, Rio de Janeiro) : « Pour un méta-pluralisme ontologique : le cas des mondes amazoniens »

Présentation : Patrice Maniglier (Paris Ouest Nanterre)

19.00 Cocktail

 

Jeudi 17 novembre

Lieu : École normale supérieure

Théâtre – 45 rue d’Ulm

9.30 Introduction

9.45-11.15 Table ronde 

La métaphysique des autres

Modération : Martin Fortier (EHESS)

Patrice Maniglier (Paris Ouest Nanterre) : « Variantes de la métaphysique »

Anne Sauvagnargues (Paris Ouest Nanterre) : « Géophilosophèmes »

11.15-11.30 Pause

11.30-13.00 Table ronde

Abstrait et particulier, universel et relatif

Modération : Élie During (Paris Ouest Nanterre) 

Brice Halimi (Paris Ouest Nanterre) : « Choses en soi et vérités absolues »

Frédéric Nef (EHESS / Jean Nicod) : « Les particuliers abstraits : nominalisme ou réalisme ? »

13.00-14.45 Pause déjeuner

14.45-16.15

Table ronde 

De l’idéalisme au réalisme : raison, langage, animalité

Modération : Élise Marrou (Paris Sorbonne)

Francis Wolff (École normale supérieure) : « De la raison à l’idéalisme, du langage au réalisme »

Etienne Bimbenet (Bordeaux-Montaigne) : « L’idéaliste que je ne suis plus »

16.15-16.30 Pause

16.30-18 Table ronde 

La phénoménologie est-elle irrémédiablement idéaliste ?

Modération : Emmanuel Alloa (Univ. Saint-Gall)

Claude Romano (Paris Sorbonne) : « Réalisme et réduction »

Fabrice Colonna (CPGE - Académie de Versailles) : « L’ouverture métaphysique de la phénoménologie et l’obstacle réaliste »

18-18.15 Pause

18.15-19.15 Conférence : Paul Boghossian (New York University) : « Reality»

Présentation : Maurizio Ferraris (Univ. de Turin)

 

Vendredi 18 novembre

Lieu : École normale supérieure

Théâtre – 45 rue d’Ulm, 5e

9.30 Introduction

9.45-11.15 Table ronde 

Kant, Kant, Kant

Modération : Jean-Michel Salanskis (Paris Ouest Nanterre)

Paul Clavier (École normale supérieure) : « Kant : le fossoyeur du réalisme ? »

Maurizio Ferraris (Univ. de Turin) : « Dékantation, ou comment purifier la philosophie du mythe du “mythe du donné” ? »

11.15-11.30

11.30-13.00 Table ronde 

« Phénoumène » et réalité sans réalisme

Modération : Élie During (Paris Ouest Nanterre)

Arkady Plotnitsky (Purdue University) : « Thinking with the unthinkable in physics and philosophy »

Gabriel Catren (CNRS - Paris Diderot) : « Le “phénoumène” »

13.00-14.45 Pause déjeuner

14.45-16.15 Table ronde 

Dieu : existence, croyance, expérience

Modération : Paul Clavier (École normale supérieure)

Yann Schmitt (CPGE, Académie de Créteil / EHESS) : « Théisme réaliste et scepticisme religieux »

Camille Riquier (Institut Catholique de Paris): « L’incroyable Dieu »

16.15-16.30 Pause

16.30-18 Table ronde 

Vie, mondes

Modération : Emmanuel Alloa (Univ. Saint-Gall)

Frédéric Worms (École normale supérieure) : « Vitalisme critique »

Pierre Montebello (Toulouse Le Mirail) : « Métaphysiques cosmomorphes »

18-18.15 Pause

18.15-19.15 Conférence : Jean-Luc Marion (Paris Sorbonne) : « Qu'est-ce qu'être réellement réaliste ? »

Présentation : Camille Riquier (ICP)

 

Samedi 19

Lieu : Columbia Global Centers Paris

Reid Hall – 4, rue Chevreuse, 6e

9.45 Introduction

10-11.30 Table ronde 

Désubjectiver l’empirisme ?

Modération : Camille Chamois (Paris Ouest Nanterre) et Robert Spears (Purdue University)

Dan Smith (Purdue University) : « Is transcendental empiricism compatible with realism? »

Didier Debaise (Univ. libre de Bruxelles) : « Un univers de subjectivités : perspectivisme et corrélation dans la métaphysique contemporaine »

11.30-11.45

11.45-13.15 Table ronde 

Fatalisme et matérialisme

Modération : Emmanuel Alloa (Univ. Saint-Gall)

Frank Ruda (Bauhaus Universität Weimar / Bard College Berlin) : « The worst has already happened. In defense of fatalism »

Catherine Malabou (Kingston University / Irvine) : « Le vide politique du réalisme contemporain, ou pourquoi je suis matérialiste »

13.15-14.45 Pause déjeuner

14.45-16.45 Table ronde 

Questions au réalisme spéculatif

Modération : Louis Morelle (Paris I- Panthéon Sorbonne)

Michel Bitbol (CNRS - Archives Husserl) : « Une genèse continuée du transcendantal »

Raphaël Millière (Univ. d’Oxford) : « Concevabilité, modalités et fondationnalisme : une critique du réalisme absolu »

Pierre Cassou-Noguès (Paris 8 - Saint Denis) : « Imaginer le commencement (ou la fin) de l'univers »

16.45-17 Pause

17-18.30 Table ronde 

Métaphysique et naturalisme

Modération : Patrice Maniglier (Paris Ouest Nanterre)

Ray Brassier (American University of Beirut) : « Subject and Object Naturalism »

Quentin Meillassoux (Paris I- Panthéon Sorbonne) : « Réponse à Ray Brassier »

18.30  Envoi

 

 

 

Ajouter un commentaire