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ÉCHIVARD Jean-Baptiste

Parcours universitaire

 

     Je ne sais si l’on peut parler de ‘parcours universitaire’ au sens classique, sens qui mériterait d’ailleurs une exégèse approfondie… Qu’il s’agisse d’un parcours, certainement, de philosophie, sans nul doute, certes ‘universitaire’- puisque des universités m’ont formé et que j’enseigne à l’IPC – Facultés libres de philosophie et de psychologie - à condition d’apporter dans ce mot tout ce que la réalité et l’expérience de l’enseignement effectif des disciplines philosophiques peuvent apporter de réalisme – ou du moins de désir de réalisme ! - pédagogique et philosophique à l’étude, à la méditation, et à la recherche par l’intelligence de la vérité du cosmos, de l’être humain et de leurs causes.

     L’une de mes premières interrogations, qui demeure encore aujourd’hui présente, a porté sur la juste harmonie entre la philosophie et la théologie ; très tôt, dès ma classe de terminales, en 1967, c’est avec Thomas d’Aquin que j’ai réfléchi sur cette harmonie en voulant la juste autonomie de l’interrogation philosophique par rapport à la théologie et en même temps je percevais combien la théologie, la foi elle-même dans ses affirmations essentielles, pouvait aider la philosophie, combien, sous un certain rapport, elle la dépassait. L’actuelle IPC - Facultés libres de philosophie et de psychologie qui s’appelait à l’époque Faculté libre de philosophie comparée que je rejoignais dès la première heure en 1969 parallèlement à la licence à la Sorbonne et après un baccalauréat scolastique à l’Institut catholique de Paris m’a appris à lire en philosophe saint Thomas d’Aquin, à travers, en particulier, ses commentaires sur Aristote ; j’étais, de ce fait, amené à découvrir aussi le texte même d’Aristote en même temps que celui de saint Thomas. J’avais été aussi préparé à cette lecture et à ce désir par un certain nombre de professeurs à l’Institut catholique de Paris (année 1968-1969), par exemple, le chanoine Verneaux, l’abbé Grenet et M. Jacques de Monléon et à la Sorbonne (1967-1968 ; 1969-1972), plus particulièrement M. Claude Tresmontant. Mais rechercher l’harmonie entre la philosophie et la théologie, vivre la pleine autonomie de la philosophie et aller jusqu’au bout de ce qu’elle est capable de découvrir par elle-même, c’est aussi rendre possible l’harmonie entre les sciences dites expérimentales (celle de la nature aussi bien que les sciences dites humaines) et les disciplines philosophiques. Mais c’est parce qu’il m’a fallu enseigner, que j’ai mieux compris cette mise en ordre des savoirs et ceci parce que je voulais avec bonheur former les intelligences des jeunes qui m’étaient confiées et, par là, nourrir leur volonté. Au fond, je découvris combien l’on ne pouvait séparer la recherche philosophique de l’enseignement et combien c’est par celui-ci que l’on peut comprendre progressivement les grands thèmes de la philosophie. D’une certaine manière, avoir été comme un « généraliste » de la philosophie et avoir connu les joies, les difficultés, les lenteurs ou même les révoltes et les indifférences que le climat d’une classe de Terminale peut nous faire rencontrer a été source d’expérience, de digestion, d’assimilation de la philosophie. C’est en enseignant que l’on comprend parce qu’on ne peut bien transmettre que ce qui a été vraiment digéré par une expérience. Les élèves nous empêchent de succomber à la tentation de l’abstraction ou du maniement des concepts sans réalisme…

     Ceci aboutit à une thèse de doctorat, synthèse d’un enseignement, préparée avec le P. S. Th Bonino, o. p., - dont je fus le premier « thésard »…- à l’Institut catholique de Toulouse et soutenue le 20 octobre 2003 : Une introduction à la philosophie ; celle-ci avait quatre volumes : 1) L’esprit des discipline fondamentales ; 2) Philosophie rationnelle et philosophie de la nature ; 3) Philosophie morale et politique ; 4) Métaphysique.

     Les quatre parties de ma thèse furent publiées par le soin des éditions F. X. de Guibert et ont donné lieu à l’édition de quatre volumes. Un étudiant en philosophie est, lui aussi, en apprentissage : la philosophie regroupe diverses disciplines parce qu’il y a divers êtres dans la réalité et que selon leur différente nature on ne peut pas les connaître de la même manière : on ne peut, par exemple, pas aborder l’étude des actes humains comme on aborde celle des êtres vivants ou de la matière inerte ou de l’astronomie ; il y a donc divers ‘modes de procéder’ pour les connaître ; de ce fait, il y a diverses disciplines philosophiques. De même qu’il y a des vertus morales qui disciplinent la volonté, de même il y a diverses vertus intellectuelles qui ‘disciplinent’ l’intelligence, c’est-à-dire la rendent plus libres dans la recherche et la découverte de la nature et de la finalité de chacun de ses objets.

     J’ajoutai à ces quatre volumes un cinquième, en collaboration avec M. Pierre Magnard et M. André Clément : Un nouveau Discours de la méthode ? Il fut le fruit de mon enseignement à l’IPC : la traduction, la présentation et certains commentaires des questions V et VI du commentaire par saint Thomas du De Trinitate de Boèce, véritable ‘discours de la méthode’ de la connaissance spéculative de Thomas utilisant Aristote et sa distinction des sciences spéculatives, mathématiques, sciences de la nature, métaphysique établie par notre auteur pour rectifier le ‘mathématisme’ du pythagorisme et du platonisme.

     Parallèlement à ce travail, et sur le point de prendre ma retraite de l’enseignement en Terminales, je m’engageai dans la rédaction d’une introduction à la philosophie à partir du programme officiel des classes terminales (celui de 2003). Ce qui donna lieu à trois volumes. Une introduction à la philosophie et non pas purement et simplement un « manuel » de terminales ; la dimension généraliste de la philosophie pour éveiller l’intelligence aux grandes questions philosophiques.

     Les premiers mots philosophiques, une introduction à certaines questions principales de la philosophie à partir de la signification des termes philosophiques les plus importants et les plus usuels. Puis La Raison et le réel qui concerne la question de la vérité, et Le sujet pour les thèmes plus psychologiques et ‘existentiels’ de la philosophie. Ces volumes étaient publiés aux éditions François-Xavier de Guibert. Deux autres volumes sont parus aux éditions Artège : La culture nous aide-t-elle à vivre ? et La politique fait-elle le bonheur de la société ? qui portent sur les thèmes Culture et Morale et politique du programme.

     Je regroupai alors en un seul volume les introductions (proème selon le terme grec prooemium) que saint Thomas avaient composées pour ses commentaires des œuvres d’Aristote afin qu’en un seul volume on puisse avoir le ‘discours philosophique de la méthode’ de saint Thomas : Les proèmes philosophiques aux éditions Parole et silence, dans la collection Les Presses de l’IPC.

     De plus en plus, il m’apparaît nécessaire de distinguer les domaines pour les unir, ceci afin de comprendre que si l’on privilégie dans une formation philosophiques les commentaires de saint Thomas sur Aristote, cela ne veut aucunement dire que l’on ‘réduit’ sa pensée d’ensemble, même sur le plan de la seule philosophie, à ces seuls commentaires. L’amplitude de la pensée de saint Thomas s’est aussi nourrie au néoplatonisme, à saint Augustin, saint Jean Damascène, saint Grégoire le Grand, saint Jérôme, saint Jean Chrysostome et même Avicenne.

     Les questions écologiques, d’autre part, m’ont amené aussi à travailler la question à la fois philosophique et théologique de la Création. Aristote, saint Thomas, mais d’autres aussi parmi des auteurs récents peuvent nous aider à retrouver le chemin du réel des êtres crées qu’un accent parfois assez exclusivement porté sur l’esprit ou l’âme immatérielle ou le sujet individuel ont contribué à occulter quelque peu. N’est-ce pas une manière de philosopher en « réaliste » ? L’écologie, ne peut-elle être, sous ce rapport, une authentique introduction à une philosophie réaliste de la nature ? Encore faut-il, bien évidemment, définir ce que peut désigner le concept un peu passe-partout de réalisme…Parallèlement à ce travail, je suis en train de retrouver un auteur qui fut celui avec qui j’avais commencé ma formation philosophique en classe de Terminale, grâce à mon professeur, l’abbé Jean Milet, qui, à l’époque – dans les années 1967 -, préparait sa thèse complémentaire : Bergson et le calcul infinitésimal ou la raison et le temps.

     L’édition critique de ses œuvres complètes aux P. U. F. m’ont invité à reprendre la lecture de ce grand philosophe du XXème siècle. Certes la philosophie analytique, la phénoménologie allemande avec Husserl, et, surtout sans doute, Heidegger, les courants sociologiques ou psychologiques sont les dominantes contemporaines de la philosophie. Pourquoi Bergson qui, à son époque et selon son génie propre, avait voulu retrouver la dimension métaphysique de la philosophie, face, entre autres, à la critique kantienne, ne serait pas aussi un auteur à découvrir, à redécouvrir, précisément pour s’ouvrir à la métaphysique et rendre possible et pensable l’unité des sciences expérimentales et de la philosophie, voire l’unité de la raison naturelle et de l’expérience mystique, voie d’accès possible à la foi ?

     La relecture de ses œuvres principales, grâce aux nouvelles éditions critiques remarquables initiées par les PUF et sous la direction de Frédéric Worms ainsi que l’édition des cours commencée par Henri Hude, m’ont invité à comprendre la philosophie de notre auteur comme un authentique réalisme. Le hasard de la recherche m’a permis d’étudier les dernières années de la vie de notre philosophe, surtout à partir de ses recherches qui ont abouti à son grand livre Les deux sources de la morale et de la religion. Son interrogation vers le christianisme, son attention portée vers la morale des Béatitudes du Sermon sur la montagne et son attirance certaine vers le Christ des Évangiles m’ont donné envie d’étudier d’un peu plus près cette dimension, que l’on pourrait désigner comme catéchuménale, de la fin de la vie de notre auteur. L’attirance pour les mystiques, et en particulier les mystiques catholiques, le baptême de désir dont il a pu finalement témoigner à la fin de sa vie dans les débuts de la deuxième guerre mondiale ; le témoignage de son neveu, Floris Delattre, de Jacques Chevalier, son disciple et ami, du Père Pouget, l’accompagnateur spirituel de tant d’intellectuels de l’époque, en particulier des étudiants – parmi lesquels Jean Guitton - que Jacques Chevalier lui amenait, du P. Sertillanges, de l’abbé Journet, de Jacques et Raïssa Maritain, de Jean Guitton m’ont permis de reprendre cette question de la « conversion » de Bergson.

     Car avec Pierre Magnard, nous avons trouvé à la bibliothèque Jacques Doucet, à Paris, (qui détient les archives de Bergson léguées par sa fille Jeanne), trois lettres du P. Sertillanges écrites à Floris Delattre, son neveu par alliance, qui, à notre connaissance, n’ont jamais été publiées. La lecture d’œuvres anciennes dont on parle peu comme Les entretiens avec Bergson, ou Bergson et le Père Pouget de Jacques Chevalier, Avec Henri Bergson et Henri Bergson et le catholicisme du P. Sertillanges, ou Henri Bergson, Essais et témoignages recueillis par A. Béguin et P. Thévenaz, ou Sept philosophes devant le Christ par J. M. Oesterreicher, ou le témoignage de Jacques et Raïssa Maritain dans Les grandes amitiés ou dans la Correspondance Charles Journet/Jacques Maritain (tome III) ou bien encore le livre qui est déjà plus qu’un témoignage personnel mais une véritable introduction à la pensée de Bergson, Bergson et le Christ des Évangiles d’Henri Gouhier, m’ont permis de comprendre ce que Bergson pouvait avoir vécu intérieurement dans les dernières années de sa vie. Certes ces livres plus biographiques que proprement philosophiques (excepté celui d’Henri Gouhier) ne sont pas des textes qui auraient pour vocation de nous introduire à la pensée de Bergson purement et simplement ou d’analyser tel ou tel thème important de sa philosophie. Mais ce sont des témoignages importants qui peuvent nous faire pressentir un peu du cœur profond de Bergson.

     Cela ne concerne-t-il pas aussi l’histoire de la philosophie contemporaine ? Avec ces témoignages et ces livres, et, sans doute grâce à eux, ne peut-on mieux comprendre quelle peut être ce « bergsonisme d’intention » dont parlait Jacques Maritain ? Certains des auteurs (Jacques Chevalier, Jean Guitton) d’ailleurs avaient été désignés par Bergson lui-même dans son testament comme des personnes sûres qui pouvaient défendre sa mémoire et une juste interprétation de sa pensée dans le cas ou celles-ci pouvaient être mal considérées. Quant au Père Sertillanges il fut sans doute le dernier des philosophes à avoir dialogué avec lui ; sur sa table de travail Bergson avait commencé à rédiger un texte qu’il avait promis au P. Sertillanges de rédiger et qui devait être un paragraphe supplémentaire ajouté à son livre Les deux sources ; il aurait porté sur l’Église et le lien qu’ont eu tous les mystiques catholiques authentiques avec Elle comme le rapporte le P. Sertillanges dans sa précieuse petite brochure Avec Bergson. En fait de paragraphe, ce fut, le 27 mars 1943, c’est-à-dire peu de temps après le décès de Bergson ; le baptême de sa fille par l’abbé Journet qui allait devenir ensuite le cardinal Journet.

     Ce travail sur la « conversion » de Bergson pourra se poursuivre par une étude du « réalisme » de Bergson et, si Dieu me prête vie, de la nature de l’intelligence pour notre auteur, tant il est vrai qu’on a pu lui reprocher d’avoir malmené celle-ci comme il a pu méconnaître le rôle du concept dans la connaissance, du moins si l’on tient compte des reproches de certains. Bergson nie-t-il vraiment et les capacités de l’intelligence et l’importance du concept pour nous rendre présente en nous la réalité elle-même ?

 

 

 

Bibliographie

 

  1. Aux éditions François-Xavier de Guibert : Une introduction à la philosophie (présentation, traduction et commentaire des proèmes – introductions - composés par saint Thomas d’Aquin pour introduire à ses commentaires des œuvres principales d’Aristote) :
  • L’esprit des disciplines fondamentales
  • Philosophie rationnelle et philosophie de la nature
  • Philosophie morale et politique
  • Métaphysique
  • Un nouveau Discours de la méthode ?
  1. Aux éditions François-Xavier de Guibert :
  • Les premiers mots philosophiques
  • Les premières questions philosophiques :
  1. La raison et le réel
  2. Le sujet
  1. Aux éditions Artège :
  • La culture nous aide-t-elle à vivre ?
  • La politique fait-elle le bonheur de l’homme ?
  1. Aux Presses de l’IPC :
  • Proèmes philosophiques de saint Thomas d’Aquin à ses commentaires des œuvres principales d’Aristote.

 

 Jb proemes   

 

Jb intro 1    Jb intro philo

 

Jb intro 5   

 

Jb 1ers mots    Jb raison reel    

 

Jb culture     Jb politique

 

Jb e

 

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